L’effervescence des vendanges tout juste derrière nous, je me dois d’en apprendre plus sur le millésime nouveau-né qui grandit à l’abri des chais. Suivez-moi, ici le Marquis de Terme, votre envoyé spécial au cœur des vignes !
J’ai vécu toutes les phases de ce millésime de l’intérieur, aussi impliqué à l’heure de la taille que de l’apparition des premiers bourgeons, allant même jusqu’à prêter main-forte une fois les vendanges venues, lunettes de soleil sur le nez et perruque toujours bien en place.
Alors pensez-vous, avec ma dévotion et mon abnégation toutes paternelles, je n’allais pas arrêter de suivre abruptement la croissance de cet enfant qui est aussi un peu le mien !
Pour comprendre les tenants et aboutissants de ce 2019, quel meilleur interlocuteur que le très aimable et pédagogue chef de culture David Houdet ?
Nul doute que, les raisins désormais rentrés au chai, il dispose de quelques minutes pour épancher ma soif de savoir. Alors que je décide de me lancer en quête de mon interviewé de choc, je l’aperçois justement se dirigeant vers le chai.
« Mon cher David ! le hélé-je à travers la cour du château. Plongé dans ses pensées, surpris d’être ainsi interpellé, il s’arrête net avant de me voir et de m’adresser un petit bonjour amical de la main, accompagné d’un large sourire.
Je lui fais signe de s’approcher. Le pas alerte, il se dirige prestement vers moi, et m’interroge, l’air circonspect : « que se passe-t-il Marquis, un problème ? »
Je le rassure immédiatement sur le motif de mon interception.
« Ne vous taraudez point, mon cher, j’aimerais juste requérir quelques informations – que je sais d’avance de première qualité -, sur le millésime. »
Toujours bienveillant, il m’encourage à poursuivre. Je commence donc à le questionner :
« Je dois vous avouer, mon cher David, que les très chaudes températures estivales m’ont un tantine inquiété sur le sort des jolies baies de ce 2019.
Mes craintes étaient-elles fondées ? »
« Tout s’annonçait sous les auspices les plus normaux au printemps, figurez-vous, Marquis. On avait assez d’eau, les températures étaient parfaites, il n’y avait pas de souci particulier. »
Je retiens mon souffle, car je pressens bien que c’est ultérieurement que Dame Nature a donné quelques sueurs froides et chaudes, dignes de la grippe la plus tenace, au pauvre chef de culture.
Il me détaille l’affaire.
« Nous avons ensuite fait l’ascenseur émotionnel de la climatologie durant ce millésime », concède-t-il.
Devant mon air interrogateur, il précise :
« Le mois de juin a été trop humide et frais, même plus que le mois de janvier, vous imaginez, Marquis ! La vigne a poussé lentement, l’apparition de la fleur s’est fait attendre et s’est étalée dans le temps. Ensuite, juillet a été très chaud et sec, et sur nos sols très filtrants, certaines parcelles ont accusé le coup dès la mi-juillet, avec un décalage de la véraison, ce changement de couleur des baies signant la maturité et l’approche de la vendange. »
C’est donc avec une once d’anxiété que le pauvre David Houdet est parti en congés début août, à peine la véraison amorcée, croisant doigts de pieds et mains pour que la situation se débloque. Ce n’est finalement qu’en septembre que des pluies salvatrices ont relancé la croissance des baies.
« On avait prévu de vendanger fin septembre, mais avant le 20 septembre, la météo annonçait de grosses précipitations, risquant d’interrompre les vendanges. Ca a affolé beaucoup de monde, mais ici, on est restés sereins, et on a vendangé aux dates fixées dès juin. »
Ah quelle force de caractère, quel homme résolu que ce David Houdet ! La récolte a donc débuté paisiblement le 24 septembre, pour sauver de la perdition les baies des quelques ceps de merlots les plus touchées par le stress hydrique, et se sont poursuivies la semaine d’après « avec douceur et gentillesse, sans empressement aucun » me précise David Houdet.
« On dégustait nos raisins pour savoir s’ils étaient prêts, et on a attendu le maximum de ce que pouvait nous offrir le terroir. Nous avons vraiment eu un état sanitaire optimal, avec des rendements au rendez-vous, ce qui est d’autant plus réjouissant que c’est notre première année sans aucun traitement anti-botrytis ! »
C’est donc tout naturellement avec un moral plus qu’optimiste que les vendanges se sont achevées le 17 octobre.
Ahhhhhhhhh, que j’aime ce genre de dénouement heureux, comme dans les contes de fées, où finalement, tout est bien qui finit bien ! Maintenant, le relais passe au chai pour la suite de ce très prometteur 2019.
Quel beau travail d’équipe que la naissance d’un millésime, j’en suis tout ému !